UN RITE DE VACANCES

Publié le par Boutrolle

Je suis sûre que vous avez des rites de ce genre, des passages obligés sans lesquels vos étés seraient incomplets, avec un petit goût de « passé à côté ».

 Aller cueillir des groseilles dans le jardin de tante Ursule, faire le tour des bateaux du port de Ste Gudule-sur-mer, ou faire une pétanque avec les voisins-de-camping-qui-sont-toujours-les–mêmes-depuis-le-Front-Populaire…

Alors, je m’exécute, et puis vous zaussi (envoyez-moi un mail ou laissez un message où je vous le donnerai), et je publierai vos perles, si vous êtes d’accord bien sûr.

Pour la famille La Grive les vacances d’été passent toujours par un séjour sur la merveilleuse presqu’île de Giens : l’antichambre du paradis, j’adore !

Depuis plusieurs années, pour régaler copains et famille (Giens est un haut lieu de retrouvailles familiales), je prépare la soupe de poissons.

Déjà, avant de partir en vacances, il faut penser à emporter mon sacro saint moulin à légumes et le safran (du fenouil aussi mais on peut le remplacer par une cuillère à soupe de Pastis).

« Demain je fais la soupe de poisson » déjà, tout le monde s’inscrit, et puis commence le rite.

En vacances on se « radasse» au lit le matin… mais ce jour là on met le réveil, pour être au port dès le retour des pêcheurs, c'est-à-dire 9 heures, je serai vite récompensée d’être si matinale ( !)

En effet, à mon lever ils dorment tous, j’avale une bricole, je prends mon cabas, je saute dans l’auto, et je file vers le petit port du Niel à travers la presqu’île endormie. On n’y croise que des mamies armées de leurs paniers, qui vont au marché de bonne heure (et avant les touristes), et je suis sûre qu’elles savent où je vais….elles savent tout ces petites dames !           Le port est là, tout calme, l’eau rosée des rayons obliques du matin, pas un bruit si ce n’est un léger clapot près de la digue, le moindre son résonne  dans ce cocon presque fermé, ça sent bon la mer et la résine de pin.                                                         Je ne suis pas seule, quelques esthètes attendent nonchalamment en échangeant des nouvelles et des recettes, on est bien, le soleil est encore doux, la journée est prometteuse                           

Puis on entend le pet-pet bien connu du premier pointu qui rentre, suivi bientôt par les autres : Antoinette, Les Deux Sœurs, Tintin et la suite viennent s’amarrer le nez au quai, on les aide (ils font semblant d’en avoir besoin…). Ils sont déjà en train de « démailler », des amis restés à terre viennent les aider. Chacun a « son » pêcheur, moi c’est Pépito, regard bleu et catogan, il fait de la philosophie (où l’élégance de la rascasse remplace celle du hérisson !) et n’a pas son pareil pour les recettes de cuisine (d’ailleurs cette année, il a été édité par la Chambre de commerce : c’est quelqu’un Pépito !).

     -         Je voudrais un bon kilo de soupe, s’il vous plait.

     -         Pour la soupe il faut attendre un petit peu, qu’on finisse de démailler…

J’ai tout le temps ! vous pensez !                                            Pendant ce temps les jeunes se font nommer les poissons : saupes, girelles, sars, galinettes, vives (attention ça pîque !), moustelles, parfois quelques belles bonites, des langoustes, un homard tout bleu !

Le bonheur des yeux.

-         Non monsieur j’ai pas de bouille (soyez rassurés, il n’est pas défiguré, il n’a pas de bouillabaisse, c’est le dialecte !)

-         (à moi) Je vous mets des piades ?

Bien sûr que j’en veux : ça donne un goût de crustacés sublime…                                                                                            Il sort sa balance romaine, et me pèse le poisson tout frétillant (qui crie « mange-moi » !) et rajoute les coquillages après pour le bada car ça pèse.                                                                         De toutes façons c’est toujours « bon poids » et puis en plus j’ai eu mon plein de conseils, informations maritimes et culinaires, réflexions profondes et sourire complice, alors je suis aux anges !

De retour je passe à la capitainerie voir la météo du jour, il y a toujours une sortie de prévue, et à la boulangerie car mes monstres ont dû se lever et ils aimeront les croissants, en plus il y aura peut-être des croûtons tout prêts, je gagerai du temps en soirée.

Bon ça c’est le premier épisode, accessible à tout le monde (avec un petit lexique local), pour la suite c’est de l’art, alors tenez-vous bien !

 

 

 

 

 

 

 

 

SOUPE DE POISSON DE LA GRIVE

Marché :

1.2 kg de soupe de roche (on peut l’acheter chez le poissonnier mais on loupe quelque chose !) s’il il y a des petits crabes, des bious, des bernard l’hermite (« piades »), c’est très bien aussi.

2 gros oignons

3 belles tomates

3 gousses d’ail

2 feuilles de laurier

quelques branches de fenouil (ou 1 cuas de Pastis)

sel, poivre et safran.

Pour la rouille :

1 grosse gousse d’ail 

1 jaune d’oeuf                                                                                       1 cuillère de moutarde

safran ou quelques gouttes de concentré de tomate si vous êtes fauché.

Huile d’olive.

En plus : des croûtons, du râpé ou/et du parmesan

Rincer les poissons et les coquillages, ne vider que les plus gros.

Dans une grande casserole (je trouve la cocotte minute bien pratique pour ça) faire revenir l’oignon en rondelles et l’ail dans une bonne rasade d’huile d’olive, rajouter les tomates en quartiers puis les poissons entiers, les coquillages, crabes… le fenouil (si vous n’en avez pas on mettra du pastis à la fin), le laurier. Mélangez le tout et laisser cuire un moment : ça fait un magma pas très esthétique mais qui sent déjà rudement bon.

Couvrir d’eau et quand ça frémit, laisser cuire ½ heure à feu doux en remuant de temps en temps.

Bon, là on part se baigner parce que la cuisine en été… ça réchauffe !

Ensuite il faut « passer » la soupe, c’est là qu’entre en scène le fabuleux moulin à légumes que je tiens de ma grand-mère (celui là je crois bien que je l’emmènerai sur une île déserte !)

Poser le moulin sur un grand récipient bien stable, drapez vous dans un grand tablier (très sexy le tablier sur le maillot de bains !), et zou !

Une louche, moulinez, une louche, moulinez… etc, jusqu’au fond de la casserole. Bon vous épargnez les coquillages à votre appareil si vous voulez qu’il resserve mais vous pouvez en extirper les bébêtes et leur faire subir le même sort que le reste.

Surtout n’oubliez pas de gratter régulièrement le dessous du moulin, c’est là qu’est le meilleur.

Vous avez obtenu une belle soupe, ajoutez le safran, le pastis si vous n’aviez pas de fenouil, rectifiez l’assaisonnement, c’est tout. Je ne mets pas de pâtes dans ma soupe, je trouve que ça n’ajoute rien.

Pour la rouille ce n’est ni plus ni moins qu’une mayonnaise avec ail et safran, je ne vous ferai pas l’affront de vous expliquer comment faire.

Bon, là on repart se baigner parce que la cuisine en été…

Pour la fin de l’épisode je vous laisse imaginer la terrasse le soir, les cigales qui nous font le « bis », l’odeur des eucalyptus, les bougies sur la table, cette petite odeur iodée-safranée qui flotte. Peu de bruit, celui des cuillères, un discret « passe-moi la rouille s’il te plait », le bonheur !

Bon maintenant c’est à vous, j’attends avec impatience vos rites de vacances, je suis sûre que vous avez des pages d’anthologie, et si vous êtes bons on fera un livre... (on a le droit de rêver non ?)

Publié dans font.fouelo

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L
C\\\'était vraiment une superbe soirée ... une récidive sympa à recommencer chaque annéeTendresses arbanaises
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V
oui, oui, j'entends bien le "passe moi la rouille" !!<br />  <br />  
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M
ZUT  où est passé mon premier commentaire<br /> dur ton système   bon toujours à l'affût, ai quand même ta recette et le plaisir de lire comment tu as le poisson   bizzzz ghjulia
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L
merci Clo,<br /> J'ai une soupe au congélateur, vous descendez un WE et je vous la mitonne! Quand?
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C
ça, c'est de la vraie cuisine ! et si bien racontée :-)c'est une soupe que je n'ai encore jamais tentée ( et pourtant j'adore ça )chez nous les vacances sont à leur apogée avec un plat de spaguetti alla vongolé ( aux coques) dégustées aux bougies (donc très tard ) et suffisamment près de la plage pour pouvoir directemnt jeter les coques du jardin vers les rochers ;-)
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